La vie seule à domicile devient difficile pour Mme A.
Tout le monde vous le dira, à commencer par l’infirmière, le médecin, l’orthophoniste...
Mais finalement, est-ce que ce n’est pas plutôt pour sa fille, pour ses enfants que ça devient trop difficile ?
Répondre à la dizaine d’appels quotidiens de la part de Mme A, faire l’inventaire des placards et frigos à chaque passage pour enlever ce qui est périmé, la recherche incessante des clés, sans parler des papiers égarés.
Il faut aussi organiser le passage des uns et des autres, leur remplacement, les dossiers interminables pour financer tout ça…
Mais la goutte de trop, c’est cette sortie de Mme A la semaine dernière pour se rendre au travail à 4h du matin, à pied sur la départementale, ramenée par la police.
Et si ça avait été en plein hiver ? Et si elle était tombée ? Et si, et si, et si ?
« Je n’en dors plus ».
« Si je la prenais chez moi, je pourrais l’avoir sous les yeux, ce serait plus rassurant ».
« Maman a toujours vécu chez elle, a eu son indépendance, elle n’acceptera pas d’aller vivre ailleurs ».
Et si c'était les limites des proches, des aidants, qui étaient l’élément déclencheur ?
Car Mme A, elle, sait que tout va bien ! Qu’elle n’a besoin de personne et que tout ça n’a aucun sens, puisqu’elle est en excellente santé, d’ailleurs à son âge, elle ne prend aucun médicament et se déplace sans difficultés.
Alors, comment lui en parler ?
Comment faire entendre l’inentendable ?
Comment aborder cette séparation ?
Attendre que Mme A soit prête est un vœu pieux, puisque, les choses étant bien faite, cette maladie protège d’avoir entièrement conscience de ses difficultés. Il ne lui est pas possible de reconnaître ses difficultés et d’agir en conséquence. Quelle protection pour son identité, mais quel frein pour l’entourage !
Lui imposer un tel changement de vie serait la désemparer de tout pouvoir d’action et de décision par elle-même. Y a-t-il une voie du milieu ?
Celle de la confiance, de l’entraide, de pousser sans précipiter, de mettre sur la voie sans dériver.
« Maman, pour moi, ce n’est plus possible. J’ai pensé à plusieurs possibilités, en voici deux avec lesquelles je suis en confiance, avec lesquelles je me sens bien,
regardons ensemble. »
Aujourd'hui,
Mme A a bien compris. Elle regarde avec sa fille, en discute.
« Finalement ça pourrait être pas si mal, je serai moins seule, je suis tellement triste quand tu pars et que je me retrouve toute seule. Et puis, si ça peut te faire plaisir… ».
Demain,
Mme A ne comprendra plus pourquoi ce sujet revient sur le tapis. Encore plus tard, elle se mettra en colère, et quelques temps plus tard, elle se montrera pleine de reconnaissance pour tout ce que fait sa fille pour elle.
Mais n’oublions pas que l’amour des parents pour leurs enfants est inconditionnel, surtout quand ils prennent soin d’eux, sans s’oublier soi-même, et que le plaisir d’être ensemble remplace l’inquiétude.
A suivre...
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